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ECRIS-MOI, PRINCESSE (Partie 2)



— Jade ! Ouvre-moi ! C’est papa !

Si je me fie à ce qu’elle m’a raconté par téléphone, elle ne travaille pas le dimanche. Depuis la fin du lycée, elle déteste la pluie, alors elle préfère s’enfermer chez elle devant une série, ou une émission de son groupe favori.

Je laisse mon doigt appuyé sur la sonnette, et continue de frapper comme si ma vie en dépendait. Alertée par mon vacarme, la voisine de palier me rejoint, et pose sa main sur mon épaule.

— Calmez-vous, monsieur.

— Me calmer ? grondé-je. Je n’ai pas de nouvelles de ma fille depuis des mois et vous me demandez de me calmer ?

La colère parle à ma place. La pauvre femme aux cheveux gris recule de quelques pas, sans pour autant retourner chez elle.

— Si je comprends bien, vous êtes monsieur Cohen, le père de Jade Cohen, en déduit-elle.

— C’est exact. Savez-vous où elle se trouve actuellement ?

La voisine, qui ne dépasse pas le mètre soixante, fixe la porte du logement de Jade. Un léger sourire se dessine sur son visage, et une lueur brille dans son regard.

— Je vois, lance-t-elle seulement en plissant les yeux.

— Que voyez-vous ?

— Votre enfant est une femme formidable. Elle est très bien élevée, elle a le cœur sur la main et est serviable. Vous l’avez très bien éduquée, monsieur Cohen.

Je reste sans voix devant tous ces compliments qui réussissent à me toucher.

— Toutes mes félicitations, finit-elle par me dire en tournant les talons.

— Attendez, madame ! Vous n’avez pas répondu à ma question. Où est ma fille ?

— Elle travaille. Elle travaille très dur même, termine-t-elle avant de me laisser seul dans le couloir.

Qu’insinue-t-elle ? Jade m’a certifié qu’elle était toujours de repos le dimanche. A-t-elle changé d’emploi ? Je récupère mon téléphone dans ma sacoche et compose le numéro de ma princesse. Cette fois, je tombe directement sur le message. Je n’abandonne pas et appelle son petit-ami, en inconnu.

— Allô ?

— Fiston ! Que je suis content d’entendre ta voix !

— Beau papa ? Pourquoi me téléphonez-vous en numéro masqué ?

— Pour enfin réussir à obtenir une réponse de l’un de vous deux. Où es-tu actuellement ?

— Sur mon lieu de travail, je suis en pause, mais je vais bientôt reprendre.

J’essaie de me concentrer sur les bruits de fond afin de déterminer s’il me raconte la vérité. Une sonnerie de téléphone retentit au loin, mais tout semble silencieux. Même lui parle à voix basse.

— Je suis devant votre appartement, avoué-je.

— Pardon ? Mais que faites-vous ici ?

— Je voulais vous voir, pardi !

— Je suis vraiment désolé, beau-papa, mais Jade et moi sommes un peu occupés ces derniers temps.

— Comment ça ? Vous comptez vous marier ?

Ma remarque l’amuse, ce qui me soulage. Je ne me suis pas encore préparé à ce que ma petite protégée épouse un autre homme.

— Non, beau-papa. J’ai pas mal de travail à l’hôpital, et Jade doit faire de nombreuses heures supplémentaires.

— À quelle heure rentrez-vous ? Je vous attends devant votre porte.

— Je m’excuse, mais il serait préférable que vous retourniez chez vous.

— Et pour quelle raison ? m’énervé-je.

Une voix féminine semble appeler mon gendre. Il échange une conversation avec cette femme. Même s’il doit sans doute bloquer le micro de son smartphone avec sa main, je réussis à distinguer quelques mots : « votre compagne », « vite », et « c’est l’heure ».

— Je dois vous laisser, beau-papa, je vous téléphone dans une petite heure.

— Fiston ! Attends !

Au même moment, la porte de la voisine s’ouvre à nouveau. Elle tient entre ses doigts une enveloppe verte qu’elle me tend.

— Votre fille m’a demandé de vous la confier lorsque vous viendriez lui rendre visite, m'informe-t-elle.

— Quand cela ?

— Oh ! La semaine dernière seulement. Mademoiselle Cohen se doutait que vous toqueriez bientôt à son domicile.

Cela ne m’étonne pas. Même si je ne réceptionne aucune réponse de sa part, je continue de lui envoyer des textos. Dans le mois qui a précédé, je l’ai prévenu que si elle ne me donnait aucune nouvelle dans les jours qui suivent, j’envisageais de me déplacer jusqu’à chez elle.

— Je vous souhaite une bonne journée, monsieur Cohen.

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